La tunique, l'ancêtre de la chemise
La plus ancienne chemise conservée date de l’Antiquité (vers 3 000 avant J-C). A l’époque, on ne parle pas de chemise mais plutôt de tunique. Elle était composée de deux manches et d’une couture latérale. La tunique était généralement faite de lin, de laine ou encore de soie.
Plus tard, au Vème siècle, la tunique ne doit pas être vue, elle devient la camisia. C’est un vêtement qui n’est pas fait pour être élégant puisqu’il n’avait ni forme ni dimension précise. Cependant, il était fait pour protéger la peau des habits rugueux que l’on pouvait porter à l’époque. La camisia servait donc de sous-vêtements.
Par la suite, la tunique des Perses est ramenée en Europe par les croisés. La tunique se compose de manches qui sont coupées puis cousues au niveau des poignets. Elles ne descendent plus comme les précédentes tuniques mais sont portées court par les hommes. Ce qui amorce la transformation de la tunique vers la chemise.
Une utilisation qui évolue au fil des années
Un sous-vêtement
Au Moyen-Age, la chemise n’avait pas encore cet aspect très propre et raffiné tel qu’on peut le voir de nos jours. Les chemises étaient faites de lin ou de laine, des matières premières très résistantes. Ainsi, elles pouvaient être lavées et bouillies régulièrement, la question de l’hygiène étant importante aux XIIIème et XIVème siècles.
C’est à cette période que les chemises semi-boutonnées apparaissent : elles étaient boutonnées uniquement au-dessus de la poitrine, et revêtaient un symbole. En effet, plus la chemise était longue et plus son propriétaire était fortuné.
Un signe de distinction sociale
Au XVème siècle, la chemise qui auparavant n’était qu’un sous-vêtement, devient à la mode et doit être visible. Les matières nobles comme la soie prennent le pas sur les matières grossières que sont la laine et le lin. La chemise s’affine et le col est ajouté.
La blancheur de la chemise est mise en avant par l’encolure dégagée. La chemise devient désormais un signe de distinction sociale.
Au siècle suivant, le style du col et des poignets des chemises s’alourdit de dentelle, de broderie et de boutons. Le statut social transparaît par l’ornement de la chemise.
Une segmentation entre hommes et femmes
Peu à peu les boutonnières se développent et avec elles la différence entre les articles féminins et masculins. Ainsi, la boutonnière est à droite chez les hommes, tandis qu’elle est à gauche chez les femmes. Au XVIIème siècle, les femmes de haut rang se faisaient habiller par des servantes et la boutonnière en étant à gauche, leur facilitait le travail.
Au XVIIIème siècle, les hommes portent des chemises avec des poignets en dentelle et agrémentée d’un jabot blanc. Lorsque Napoléon arrive au pouvoir, au début du XIXème siècle, la chemise se cache, seuls les poignets et les cols peuvent apparaître. Elle devient également plus longue, et le col est relevé en pointe maintenue par une cravate.
Un secteur en mouvement constant
L’apparition du métier de tailleur, la chemise comme élément de distinction
C’est au XVIIème siècle qu’apparaît le service de tailleur. Les chemises sont alors coupées et cousues à la main. Le tailleur y incorpore des éléments luxueux et la chemise maintenant sur mesure est un gage de bon goût et de réussite.
Hannah Montague, une américaine qui vivait à New York en 1820, démontait les cols des chemises de son mari pour les laver à part. Ainsi, son époux donnait toujours l’impression de porter une chemise propre. A partir de cette idée Madame Montague dépose un brevet en 1927 et démarre une activité de fabrication de cols amovibles. Rapidement le succès vient et l’activité se développe.
Des sociétés concurrentes ouvrent et bientôt apparaissent à leur tour les poignets amovibles… Au début du 20ème siècle, la fabrication de cols et poignets et la blanchisserie associée sont une industrie à part entière. Les produits de cette industrie sont destinés avant tout aux classes aisées. Les cols blancs se distinguaient des cols bleus des ouvriers.
La création des tailles standards, vers une production de masse
En 1850, par le biais d’un brevet, la maison Brown, Davis & Co of Aldermanbury invente une chemise faite en série. Au début du XIXème siècle les vêtements et plus particulièrement les chemises étaient réalisés par des tailleurs et couturières dispersés à travers le pays. La révolution industrielle rassemble ces ouvriers par savoir-faire dans des ateliers spécialisés.
La conception, la coupe et le repassage de la chemise sont regroupés et réalisés au sein d’une même unité, la couture reste séparée et est sous-traitée par d’autres entreprises. Grâce à ces nouvelles organisations, les capacités de fabrication augmentent et le vêtement se démocratise progressivement.
Au début du XXème siècle, la première guerre mondiale marque un tournant. Pour habiller rapidement et économiquement ses soldats, l’armée américaine développe un système de tailles standards du vêtement. Cette rationalisation permet d’augmenter la production et d’en baisser les coûts, les entreprises adoptant ces méthodes sont appelées “confection”.
L’industrialisation du secteur
Entre les deux guerres, les américains, friands de la mode Parisienne, importent massivement les vêtements à la française. La Seconde Guerre mondiale suspend les échanges entre les Etats-Unis et l’Europe et plus particulièrement l’approvisionnement nord-américain en couture parisienne.
Les Etats-Unis doivent alors produire eux-mêmes massivement des vêtements de travail et des uniformes. L’industrialisation combinée à la standardisation des tailles leur permet de ne plus dépendre de Paris et bientôt, les confectionneurs de vêtements décident de faire des vêtements plus simples, moins chers, dont la production est plus rapide. Cette méthode, nommée “Ready to wear” influencera considérablement la mode française au sortir de la guerre.
Un accès facile aux équipements de travail
Dès la fin des hostilités, Albert Lempereur président de la Fédération de l’industrie des vêtements féminins sensibilise la presse et les confectionneurs Français aux méthodes américaines.
Peu à peu les principes du “Ready to Wear” s’imposent en France. La société Parisienne Weill démocratise la notion de “Vêtement qui va” et initie en France la notion de prêt à porter. Le prêt à porter concerne bientôt toutes les typologies de vêtements. Il désigne progressivement la notion de vêtements faits en série, avec un système de taille et portant une étiquette de marque.
On trouvera rapidement, du prêt-à-porter de création, du prêt-à-porter de couturier, du prêt-à-porter pour les ouvriers. Toutes les phases de conception du vêtement sont regroupées dans des unités de production. Les vêtements de qualité inspirés par la mode deviennent alors plus accessibles.
Les débuts du vêtement qui dure
Dès 1927, la manufacture Kidur fabrique en France des tissus de très bonne qualité, solides et qui résistent à l’usure. Connus dans un premier temps, pour leurs tissus qui durent, les fondateurs Juste Lucain Husseau et René Moynaton déposent la marque Kidur en 1935.
Kidur, c’est à l’époque des tissus destinés au monde du travail, à la fabrication de vêtements ouvriers, des tissus épais et robustes dont la couleur ne passe pas, des sergés et des moleskines faits en France. Les ouvriers avaient besoin pour travailler de vêtements peu chers mais résistants et de bonne qualité. Afin d’améliorer leurs conditions de travail, les vêtements devaient également les protéger des dangers dus aux machines mais aussi de la salissure.
La chemise, vêtement ouvrier incontournable
Les vêtements de travail devaient par ailleurs être protecteurs, confortables, fonctionnels et adaptés aux différents environnements. Dès 1945 grâce à la création d’une confection jumelée aux tissages de la Plainelière, la manufacture Kidur emploie ses savoir-faire et utilise ses tissus robustes et durables pour proposer aux ouvriers des usines et des champs des vêtements de qualité.
Dans un premier temps Kidur se fera connaître pour ses chemises, ensuite pour un vestiaire complet de vêtements durables. La qualité de fabrication, la solidité des tissus et la grande tenue des couleurs confèrent aux vêtements Kidur une durabilité exemplaire. Dès l’origine de la marque, Kidur assure son engagement grâce au slogan “Kidur, résiste à l’usure”
De vêtements de travail à ceux de la vie quotidienne
une ambition qui dure
Pendant plus d’un demi-siècle, la manufacture Kidur a habillé les travailleurs de toutes les usines du pays et sa qualité et son savoir-faire étaient reconnus par tous. Kidur était la référence du vêtement qui résiste à l’usure.
Plus tard, comme tant d’autres, la manufacture a été surprise par l’arrivée sur le marché des fringues jetables venues de l’autre bout du monde. Ne pouvant lutter, la manufacture s’est recentrée sur ce qu’elle faisait de mieux, à savoir la fabrication, mais pour les autres cette fois.
Elle a laissé sa marque historique, ce petit bout de patrimoine dormir au fond d’un placard en attendant que la notion de consommer durable, responsable et local redevienne un critère de choix.
En 2018, sentant le vent tourner, elle a relancé la machine. Kidur a fait peau neuve à travers une collection intemporelle en accord avec ses origines, une collection plus large de vêtements indémodables, toujours aussi solides, et toujours fabriqués à Courlay, en France, dans l’usine historique.